Un nombre croissant de médecins, parmi lesquels de nombreux chefs de file dans leur domaine, découvrent qu’ils souffrent du trouble déficitaire de l’attention/hyperactivité (TDAH) plus tard dans la vie. Pendant des décennies, cette maladie a été présentée comme un problème de comportement chez l’enfant, mais cela néglige les atouts uniques qu’elle peut révéler, en particulier dans des professions exigeantes comme la médecine.
La « génération perdue » et le diagnostic tardif
De nombreuses femmes et professionnels très performants ont été négligés par les premiers systèmes de diagnostic axés sur les garçons perturbateurs. Ces individus semblaient bien élevés, travailleurs ou habiles à masquer leur neurodivergence, empêchant ainsi la reconnaissance de leur TDAH sous-jacent. Pourtant, ils ont réussi malgré ce manque de soutien.
Les entretiens avec des psychiatres et des spécialistes révèlent une tendance constante : les traits traditionnellement considérés comme des inconvénients du TDAH – tels que la distraction et les difficultés dans les tâches administratives – sont souvent les mêmes points forts qui font de ces médecins des cliniciens exceptionnels.
Le pouvoir de l’intelligence associative
L’un de ses principaux atouts réside dans l’intelligence associative – la capacité de reconnaître des modèles dans des domaines apparemment sans rapport. La psychiatre Julie Le, par exemple, identifie un TDAH négligé chez les patients dépressifs résistants au traitement, en particulier les femmes âgées, améliorant ainsi les résultats grâce à cette connaissance.
De même, l’anesthésiologiste Dr Linda Bluestein voit des liens dans des troubles complexes multisystémiques comme le syndrome d’Ehlers-Danlos (EDS) bien avant d’autres. Dans un système médical fragmenté, cette capacité à synthétiser les informations entre disciplines est inestimable.
Hyperfocus : une arme à double tranchant
Le TDAH est souvent associé à la distraction, mais les personnes atteintes de cette maladie ressentent l’attention différemment. L’intérêt stimule la concentration, et lorsque quelque chose compte profondément, l’hyperconcentration prend le dessus. Le Dr Le en profite pour se plonger dans des formulations psychiatriques complexes, tandis que le Dr Bluestein l’utilise pour développer son expertise EDS reconnue à l’échelle nationale.
Cette immersion profonde permet à ces médecins de s’attaquer à des tâches que d’autres trouvent impossibles : le Dr Bluestein effectue des évaluations approfondies des patients (jusqu’à six heures) avec une énergie implacable, allant bien au-delà de la pratique standard.
Créativité et innovation dans les soins aux patients
Les cerveaux atteints du TDAH excellent dans la pensée non linéaire, ce qui amène les médecins neurodivergents à tracer leur propre voie. Le Dr Le a effectué une rare résidence combinée en médecine familiale et en psychiatrie, intégrant les soins de santé mentale directement dans les systèmes de soins primaires. Ce modèle améliore la continuité et la collaboration, répondant à un besoin de santé de longue date.
Le Dr Bluestein, une ancienne ballerine dont la carrière a déraillé à cause de l’EDS, a transformé son revers en une opportunité en créant une clinique spécialisée pour les patients atteints d’EDS et d’hypermobilité – l’une des rares au pays. Elle met même à profit son expérience en danse pour aider les danseurs hypermobiles, une population historiquement incomprise.
Empathie axée sur la mission
De nombreux médecins spécialisés dans le TDAH partagent un profond sentiment de compassion, découlant de leur propre expérience de se sentir incompris ou rejetés. Cette empathie les pousse à défendre les patients complexes qui passent souvent entre les mailles du filet. Le Dr Bluestein a ouvert son cabinet d’hypermobilité après avoir été submergée par des courriels de patients implorant de l’aide.
La Dre Le craint que d’autres cliniciens négligent le TDAH chez les patients, ce qui alimente son engagement envers un diagnostic et des soins précis. Ces médecins abordent la médecine avec un sens des responsabilités au-delà des patients individuels, dans le but de remédier aux défaillances systémiques.
Persistance et réinvention
Le TDAH présente de réels défis : enregistrement tardif, difficultés administratives, procrastination. Pourtant, lorsqu’elles sont motivées, les personnes atteintes de TDAH font preuve d’une persévérance remarquable. La Dre Le a parcouru les études de médecine, la résidence et plusieurs rôles cliniques, tandis que la Dre Bluestein a reconstruit sa carrière après avoir perdu sa carrière de danseuse.
Cette créativité, cette adaptabilité et ce courage sont souvent négligés dans les discussions sur le TDAH.
Pourquoi c’est important
Le discours dominant autour du TDAH reste négatif, mettant en garde contre le décrochage scolaire et les difficultés professionnelles. Ce cadre ignore les atouts des adultes diagnostiqués tardivement et qui prospèrent dans des domaines exigeants. Changer la conversation est essentiel.
Les enfants méritent d’entendre que le TDAH possède les atouts dont le monde a besoin : la créativité, l’empathie, l’innovation et la capacité de voir ce que les autres manquent. Le succès de médecins comme le Dr Le et le Dr Bluestein prouve que l’éclat neurodivergent peut entraîner des changements significatifs en médecine.

































